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Elisabeth Eidenbenz

LA SENYORA ISABEL

Fondatrice de la Maternité suisse d’Elne

uNE DAME DE COEUR

Une jeune femme en mission humanitaire

“C’était un très bon travail pour moi car on ne peut pas imaginer ce que cela représente de pouvoir porter de l’aide aux personnes en danger”

Elisabeth Eidenbenz, institutrice de formation, s’engagea en 1938 en tant que bénévole dans le cadre du Service civil international rattaché à la Croix-Rouge suisse. Envoyée en Espagne, elle participa à la distribution de vivres dans des cantines pour personnes âgées à Madrid près du front et à Valence où elle s’occupa d’enfants victimes de la guerre civile dans le cadre du Secours aux enfants. Au moment du retrait des forces républicaines, elle se replia sur la France. Déterminée à poursuivre son œuvre d’assistance.

Une DAME de COEUR

« Il pleut des cordes toute la journée. […] 80 000 jeunes gens sans chaussures dignes de ce nom, sans chaussettes, sans chemise derrière le fil barbelé prolongent leur existence dans la plus grande incertitude de ce qui arrivera demain. Cela me fait mal de sentir comment ces êtres humains sont désignés et considérés par des gens conscients, à des postes officiels, comme des criminels et des moitiés d’homme de moindre valeur… »

Janvier 1939, les troupes franquistes envahissent Barcelone et provoquent un exode massif vers la France : la Retirada. 500 000 personnes entrent dans le département des Pyrénées Orientales et une grande partie est internée dans des camps de concentration situées sur les plages du Roussillon. Les conditions de vie y sont très difficiles notamment au niveau de l’hygiène et des soins. Élisabeth Eidenbenz, qui organise des distributions alimentaires au Camp de Saint-Cyprien, est en première ligne avec ses amis du Service civil international pour témoigner de la détresse humaine et sanitaire. Elle alerte le Comité suisse d’aide aux enfants espagnols sur le drame qui s’opère sous ses yeux.

uNE DAME DE COEUR

La directrice d’une maternité

“nous accueillons les femmes de n’importe quelle nationalité. La misère n’a pas de patrie, ni le malheur”

Le Secours Suisse décide donc la création d’une maternité pour les femmes enceintes arrivées à terme, car rien n’est prévu dans les camps des sables et de fait la mortalité infantile est très élevée. Elisabeth après maintes recherches et tentatives notamment à Brouilla, découvre le château d’en Bardou inoccupé, le loue et le transforme en maternité dont elle devient la directrice. Le premier enfant naît le 7 décembre 1939. En tout 597 bébés naîtront dans cette Maternité jusqu’en avril 1944. Peu à peu les réfugiées espagnoles sont remplacées par des jeunes femmes juives du camp de Rivesaltes destinées à la déportation, des tziganes, des apatrides, une vingtaine de nationalités en tout.

 » C’était très important pour moi qu’il y ait une bonne atmosphère dans la maison, nous faisions beaucoup de choses ensemble, nous chantions avec elles, nous dansions ».

« Malgré son jeune âge Elisabeth va savoir diriger cette institution et lui insuffler une âme. Maternité moderne où même quelques femmes d’Elne viendront accoucher, maison de soin pour des enfants ou de jeunes femmes des camps malades qu’elle accueillera contre l’avis de sa direction, mais surtout havre de paix, à l’ambiance chaleureuse et familiale.

Pour Elisabeth, « la période de la Maternité d’Elne représente les plus forts moments de son existence, les premiers cris des enfants et la joie des mères restent ses plus beaux souvenirs même s’ils sont entachés de moments difficiles nous ramenant aux heures les plus noires de l’occupation »

(Tristan Castanier, Femmes en exil, mère des camps)

uNE DAME DE COEUR

Une juste parmi les justes

“Je disais toujours [à l’état-civil] les noms que les mères m’avaient dits, aujourd’hui, je sais que quelques-uns étaient faux, par exemple un bébé avait été appelé Antonio, et on m’avait dit que les parents étaient espagnols mais ils étaient juifs allemands”.

A partir de 1942, la maternité passe sous la responsabilité de la Croix-Rouge suisse qui, par neutralité, ordonne de ne pas se mêler des affaires intérieures de la France. Il devient donc interdit d’offrir refuge à des réfugiés politiques, en particulier les juifs. Elisabeth Eidenbentz ne cède pas, quitte à entrer en conflit avec sa direction en Suisse qui la sanctionnera à la Libération, et décide de falsifier les identités des patients pour contourner cette règle, et ainsi, malgré une surveillance de la Gestapo, 400 enfants espagnols et 200 juifs furent sauvés.

Lorsque la Gestapo débarque, à partir de novembre 1942, au château pour appréhender les femmes juives, Élisabeth Eidenbenz leur répond « Hier ist Schweiz ! » (Ici c’est la Suisse) devant des nazis ébahis de rencontrer une telle  résistance . Mais  elle se souvient aussi de son impuissance lors de l’arrestation d’une jeune femme juive allemande par la Gestapo durant l’été 1943.
En avril 1944. Les Allemands ne laisseront à Elisabeth Eidenbentz
 que trois jours pour fermer l’établissement. Elle trouve un nouveau refuge à Montagnac dans l’Aveyron.


(2) Les personnes reconnues « Justes parmi les Nations » reçoivent de Yad Vashem un diplôme d’honneur ainsi qu’une médaille sur laquelle est gravée cette phrase du Talmud : « Quiconque sauve une vie sauve l’univers tout entier ». Il s’agit de la plus haute distinction civile de l’état d’Israël.

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Une vie marquée par le don de soi et le devoir d’assistance

« J’ai fait ce que ma conscience m’a recommandé de faire et c’est tout. Il fallait le faire, c’était nécessaire et c’est notre conscience qui nous le dictait ».

Après la guerre, Élisabeth Eidenbenz s’installe en Autriche et s’occupe d’enfants de réfugiés d’Europe de l’Est dans des « Maisons Suisses » avec le soutien de l’Eglise Evangéliste Suisse. Guy Eckstein, enfant juif né à Elne le 10 octobre 1941, sauvé avec sa mère, Henia, multiplie les démarches pour la rechercher. Les retrouvailles ont lieu en 1991, en Autriche.

A partir de ce moment-là, son œuvre humanitaire commence à être reconnue jusqu’au jour où elle est honorée par Yad Vashem du titre de juste parmi les nations, le 22 mars 2002 à Elne. Plus tard, en 2006, elle reçoit la Médaille d’or de l’Ordre Social et de la Solidarité (Gouvernement espagnol) remise par la reine d’Espagne et, la même année, la Croix de Sant Jordi attribuée par la Generalitat de Catalunya (Gouvernement catalan). En 2007, elle est décorée de la Légion d’Honneur par le gouvernement français. Élisabeth Eidenbenz est décédée le 23 mai 2011, à l’âge de 97 ans.

Elizabeth Eidenbenz

Une femme lucide et engagée…

 » Ma mère m’a donné la vie, la maternité m’a donné du lait, et Elisabeth m’a donné l’espoir »

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